La
compagnie Z 22/34 est créée
en janvier 1916, sous le commandement du capitaine Dautel, anciennement au
25e bataillon de chasseurs. Elle termine son
instruction au camp de Satory le 25 février 1916.
Avec
tous mes remerciement à Guilhem Laurent qui m'a transmis l'intégralité
de ses sources et de ses documents et qui a réalisé une étude
particulièrement fouillée et extrêmement pertinente sur l'opération du
Violu in Opération spéciale sur le Violu (nuit du 2 au 3 juin 1916),
Dialogues Transvogiens, 2005-20, p9-58, Laurent Guilhem.
Elle embarque le 4 mars
1916 en gare de Versailles, vers Varangeville. Le 7 mars, le capitaine
fait une reconnaissance dans le bois de Bezange. Le 18 mars,
reconnaissance au nord de Badonviller, à la position du Chamois. La Cie doit préparer une opération
spéciale sur le secteur de la 71e D.I. qui dépend du Détachement
des Armées de Lorraine (D.A.L.), au Chamois dans la région de
Badonviller (Meurthe-et-Moselle). Le front étudié est de 1300 mètres
divisé en deux parties, l'une boisée, l'autre pas. Des observations météorologiques
effectuées, il résulte "que la partie boisée doit être complètement
écartée, des remous ayant été constatés sur toute la longueur. Que la
partie non boisée donne aux points relevés des directions sensiblement
en concordance avec les observations faites au poste fixe en direction.
Toutefois, comme le fait remarquer le capitaine dans son apostille la
longueur utilisable est de 300 m. environ et ceci dans la partie où la
densité de l'ennemi paraît être la moindre. L'opération dans ces
conditions perd beaucoup de son importance d'autant plus qu'elle ne répond
à aucune idée d'ordre tactique. En conséquence il semble qu'il faille y
renoncer et chercher ailleurs un autre emplacement. Des études et des
reconnaissances vont être faites dans ce but sur le front de la VIIe
Armée".
Des reconnaissances
sont donc menées sur le secteur de la Tête des Faux (46e DI), à partir
du 10 avril, par le personnel de la compagnie et le chef de
bataillon Bloch. Trois jours plus tard, ce dernier rédige un rapport détaillé
sur l'emploi de cette compagnie à la Tête des Faux. "A la suite de ce rapport (…) le
général commandant le G.A.E. a donné l'ordre d'entreprendre immédiatement
l'étude météorologique de cette région et de faire participer la
compagnie aux travaux d'organisation du secteur en vue d'une opération
par les gaz. Le secret des opérations ne permettant pas de loger les
hommes aux environs de Plainfaing et les ressources des camps voisins de
la Tête des Faux étant limitées, 190 hommes seulement doivent faire
mouvement à la date du 19 avril. Les autres suivront dès que les
baraques démontables destinées à les abriter seront établies. Des ordres sont donnés pour mettre le chef de poste de
la compagnie 33/2 en rapport avec celui de la compagnie 33/1 particulièrement
compétent. Ce rapprochement sera facile par suite du voisinage des deux
compagnies".
"La
reconnaissance faite sur les indications de la VIIe Armée et
en particulier de la 46e division a été exécutée en vue
d'une opération possible de gaz à la Tête des Faux.
Caractéristiques
du front : le front reconnu de 400 m.
environ se trouve à cheval sur un piton d'altitude 1219 m. Il descend
rapidement vers la droite du côté du col qui sépare la ligne française
de la position allemande Rabenfelsen (cote 1143) vers la gauche plus
rapidement encore vers l'organisation française du Bois Brûlé. En
raison du tracé assez brisé mais continu de la ligne, le front
utilisable nettement dominant se réduit à 300 m. environ. La ligne
ennemie distante de la nôtre de 60 m. environ sur une longueur de 200 m.
s'en écarte à une centaine de mètres dans les parties droite et gauche.
Derrière la position allemande, la cuvette d'Herenweiher très boisée où
se trouvent un camp et de nombreux abris ennemis pourrait donner beaucoup
d'efficacité à une action par les gaz.
Caractéristiques
des vents favorables : le front est
orienté sensiblement N.W.- S.E. Au
point de vue météorologique, c'est donc un vent S.W. assez fort qui
convient le mieux. Il serait même préférable qu'il fût orienté légèrement
W.S.W. pour éviter un déversement de gaz sur la région du Bois Brûlé.
Etude
de la première ligne : en raison de
la nature granitique du terrain, la tranchée existante uniquement dans le
roc a été créée presque partout à la mine. Le parapet constitué par
des pierres sèches et quelques sacs à terre, est couronné par des
chevaux de frise qui s'étendent assez loin de la tranchée. Il ne faut
donc pas songer à créer des abris. L'emploi du matériel léger pourra
seul être envisagé. L'installation des gaz sera assez délicate en
raison de la constitution du parapet.
Voies
de communications : la voie de 60
venant de la gare de Fraize aboutit jusqu'au col de Luschbach où passe
une excellente route se dirigeant sur le Lac Blanc. De cette route se détache
à 2 kms du Luschbach une piste conduisant d'abord au Camp de Tinfronce
puis à celui du Carrefour Duchène où se trouve le P.C. des troupes
d'occupation de la Tête des Faux. Un boyau se dirige ensuite sur
l'organisation de première ligne. Un 2e boyau est en
construction.
Abris
: il existe actuellement des abris de bombardement à 250 m. environ en
arrière de la première ligne. Six autres sont actuellement en
construction à proximité immédiate de cette première ligne. Les
fouilles faites uniquement par la mine sont très difficiles. On trouve également
quelques abris inoccupés à 500 m. de la première ligne à mi distance
de cette dernière et du Carrefour Duchène.
Poste
d'émission : en raison de la nature
du terrain il ne faut pas songer à créer des abris. On recouvrira la matériel
léger de sacs à terre.
Abris
d'attente : on pourra se servir des
abris existants qui se trouvent dans le voisinage du Carrefour Duchène à
500 m. environ de la position.
Parc
: le matériel amené par voie ferrée jusqu'au Luschbach pourra être
transporté à dos de mulet ou sur des petites voitures vosgiennes
jusqu'au Carrefour Duchène où l'installation du Parc est possible.
Résumé
et Conclusions : Etant données la
nature accidentée du terrain et la difficulté des communications, ce
front de faible longueur ne pourra se prêter qu'à une émission faite
avec du petit matériel. Les résultats des observations météorologiques
une fois déclarés satisfaisants, une opération sans idée d'attaque
d'infanterie pourrait être tentée après l'achèvement des six abris de
bombardement et du 2e boyau de communication".
Les
travaux à la Tête des Faux débutent le 29 avril. Le
22 mai, la Cie reçoit seulement 100 bouteilles sur les 300. L'opération
ne sera donc pas exécutée simultanément avec celle du Violu. En effet,
de gros travaux sont indispensables à son organisation. Celle-ci ne
pourra avoir lieu qu'après l'achèvement complet de la tranchée de
doublement, de la tranchée de soutien, des boyaux qui les relient, des
abris et de la substitution de chevaux de frise métalliques aux chevaux
en bois. Dans son rapport hebdomadaire daté du 5 juin, le commandant
Bloch précise : "ces travaux nécessiteront pour leur exécution
un mois à un mois et demi. La présence de la compagnie pourrait être
utile ailleurs et l'opération de la Tête des Faux sans être abandonnée,
être exécutée plus tard quand l'organisation du secteur sera achevée
par les troupes d'occupation. Les sapeurs de la compagnie 33/2 sont
suffisamment entraînés au travail en première ligne pour entreprendre
une émission dans un secteur quelconque du front".
Le
3 juin, les 200 bouteilles manquantes sont réceptionnées en gare de
Fraize.
Le 7 juin 1916,
contrairement aux souhaits du général Gratier commandant le secteur,
l'opération doit avoir lieu au plus tôt, dès que les conditions atmosphériques
le permettront. Techniquement, cela permettrait de réaliser l'émission
à partir du 15 juin. Le 8 juin, les bouteilles sont portées aux abris
d'attente et les premières répétitions de nuit ont lieu.
Avisé
de l'ordre donné par le général de Villaret, le commandant Bloch fait
aussitôt parvenir une note de service au capitaine Dautel : "l'opération
de la Tête des Faux étant décidée le capitaine commandant la compagnie
33/2 s'assurera du bon état des masques T.N.H. en particulier la bonne
fixation des oculaires. Il fera au besoin prendre de préférence à ses
hommes le masque M.2. : auquel il aura fait ajouter, une bride pour la
position d'attente. Les attaches élastiques seront visitées
soigneusement. Les sous-officiers recevront individuellement l'ordre de vérifier
la pose des masques, 15 minutes avant l'heure H. Il s'assurera en outre,
de la bonne fixation des tubes d'éjection sur le parapet. Ces tubes
devront être assujettis très solidement, soit, par des sacs à terre, ou
autre procédé, afin d'éviter tout déversement dans la tranchée.
Rendre compte des mesures prises".
Le
commandant Bloch, fort de l'expérience récente du Violu, donne les
instructions nécessaires en mettant l'accent sur deux points
particuliers, les masques de protection et la fixation des tubes d'éjection
sur le parapet de la tranchée.
Le
8 juin, le général de Villaret adresse un courrier assez éloquent au général
Franchet d'Esperey, commandant le G.A.E., dans lequel il annonce : "le
général commandant, la 46e D.I. m'a rendu compte qu'il était
possible de faire exécuter dès maintenant par la compagnie 33/2 l'émission
de gaz prévue à la Tête des Faux. J'ai, en conséquence, prescrit à
cet officier général de faire procéder à cette opération dès que les
circonstances atmosphériques le permettront". Le général
commandant la VIIe Armée ne fait aucune allusion aux réserves
émises par le général Gratier et le commandant Bloch. En outre, faisant
référence au rapport hebdomadaire du 5 juin du commandant du 33e
bataillon du génie, il adresse à sa hiérarchie le même jour un message
chiffré : "…il n'y a pas lieu de tenir compte des remarques
faites par le commandant Bloch qui soulève une question qui échappe à
sa compétence…". En conséquence le général Gratier, dans
son ordre particulier n° 24, ordonne : "l'émission de gaz prévue
à la Tête des Faux aura lieu, sous les ordres du colonel commandant la 5e
brigade, à partir du 10 juin 1916 dès que les circonstances atmosphériques
le permettront. L'opération se fera de nuit et à une heure quelconque.
La mise en place du matériel spécial commencera immédiatement et tout
devra être prêt pour la date fixée. Il y aura lieu de prévoir l'envoi
d'une patrouille destinée à contrôler les résultats de l'opération.
Le commandant de la 5e brigade fera connaître, s'il y a lieu,
le nombre d'appareils spéciaux de protection qui lui sera nécessaire.
S'il le juge utile, il pourra disposer de quelques sapeurs de la compagnie
du génie 28/3 pour aider à la destruction des défenses accessoires de
l'ennemi…".
C'est
le 6 juin que le 62e B.C.A. du commandant Paul Huot, en réserve
de division à Plainfaing, vient relever le 63e B.C.A. du
commandant Ville présent sur la Tête des Faux depuis le 17 mai. Celui-ci
se retire sur Fraize. Ce bataillon de chasseurs alpins aura la lourde tâche,
comme son bataillon d'origine, le 22e, sur le Violu,
d'accompagner une attaque par nappe dérivante de gaz organisée par une
compagnie spéciale du génie. "La garnison du G.C. fournira deux
patrouilles de douze hommes commandées par un chef de section qui, après
l'émission qui durera environ 15 minutes, pénètreront dans les lignes
ennemies pour recueillir des prisonniers ou des cadavres".
Conformément à l'ordre particulier n° 24 de la 46e D.I., cité
ci-dessus, le 9 juin, un détachement de la compagnie 28/3, sous les
ordres du sergent Ribollet (deux caporaux et 10 sapeurs), quitte le Violu
pour se rendre à la Tête des Faux. Ce détachement, muni de 150 pétards
de mélinite et de détonateurs pour la confection de charges allongées
en vue de créer des brèches dans les réseaux, passe en subsistance au
62e B.C.A.
Dans
la note sur les instructions préparatoires, le lieutenant-colonel Lançon
s'efforce de rassurer les troupes. Il semblerait en effet que les effets néfastes
de l'opération du Violu aient été connus. Il préconise une vérification
systématique des masques, mais pour ne pas effrayer les hommes, il ajoute
: "dire aux hommes que c'est en vue d'une attaque boche par obus
à gaz, leur expliquer qu'ils ne craignent absolument rien si leur masque
est bien ajusté, s'assurer qu'ils couchent toujours avec. Dire au
commandant Huot seul que sur les 9 chasseurs intoxiqués sur 900 au Violu,
6 l'ont été parce qu'ils n'avaient pas leur masque à portée malgré
l'ordre donné et n'ont pas pu le retrouver dans l'obscurité".
Afin d'acclimater les hommes au port du masque, des exercices sont prévus,
et il préconise que dans l'après-midi du 9 juin, les patrouilles feront
un exercice de marche et de mouvements violents, chaque homme étant muni
de son masque. Le capitaine Pierre Demmler, commandant la 9e compagnie
du 62e B.C.A., dans un rapport très détaillé nous donne
l'objectif choisi, la composition de la reconnaissance, l'instruction des
troupes (revolver Ruby, escalade) et les exercices bien spécifiques au
contact des gaz en plein air et dans un espace vicié. Les troupes sont prêtes
pour l'exécution de l'opération spéciale.
Le
26 juin, le lieutenant-colonel Soulié et l'ingénieur Cartier arrivent à
Fraize et reconnaissent durant la journée la position de la Tête des
Faux, provoquant une réaction de l'artillerie allemande. "A
11 h 15 déclenchement subit d'autres tirs violents d'artillerie et
d'engins de tranchées allemandes sur la Tête des Faux. Bombardements de
la tranchée de 1re ligne par des minenwerfer, notamment par
une pièce de 17 cm déjà repérée. En riposte déclenchement de nos
barrages sur la Tête de Grimaude, tir de nos 58. Dégâts importants,
pertes insignifiantes. Le bombardement de la Tête des Faux a coïncidé
avec la rencontre de 2 missions (une de médecins américains, l'autre
d'officiers du génie), qui ont dû attirer l'attention des boches par
leur conversation. Il est à rapprocher de celui exécuté la veille. Il révèle
de l'énervement de la part de l'ennemi et la moindre alerte pour la
moindre raison. Notre tir paraît avoir été efficace : après la
disparition du brouillard, une toile de tente et des effets ont été vus
suspendus aux arbres. La mission des officiers du génie avait pour but de
l'étude de l'opération spéciale qui devait être exécutée à la Tête
des Faux, comme au Violu. Pour cette opération, le colonel avait déjà
donné des instructions préparatoires. Son exécution ne dépendant que
de la direction du vent qui ne se montrait pas favorable depuis quelques
temps. Mais, après le déclenchement brusque et violent d'un tir de minen
et d'obus divers sur la Tête des Faux juste au moment du passage des
officiers du génie, le colonel commandant la mission fit renoncer au
projet, a rappelé la Compagnie spéciale de la Tête des Faux. Sa présence
en ce point n'a pas été apparemment inutile, car durant un mois, employée
par le Commandant du C.R. .
La
Cie du capitaine Dautel est avisée le 30 juin par ordre du général de
Villaret qu'elle est mise par le G.Q.G. à la disposition d'une nouvelle
Armée. Les hommes procèdent alors au repli de l'équipement. Le 2
juillet, la Cie quitte le camp de Tinfronce pour se rendre à Plainfaing où
elle installe son cantonnement. Le 4 juillet, elle embarque en gare de
Fraize à 21 h 30 en direction de Suippes.
Opération
de la ferme de Navarin, 25 août 1916 :
Les
reconnaissances sont effectuées le 6 juillet et les travaux commencent le
8 pour la construction de 92 abris. Le 12, 1300 bouteilles sont
déchargées en gare de Piémont (52 tonnes). Le transport des bouteilles
commence le 16 juillet. Quatre nouveaux postes sont mis en construction le
22 ; ils seront achevés le 28 juillet.
Le 25 août, la Cie est alertée à 18h ; l'ordre d'exécution est reçu
à 21h. L'émission est exécutée de 23h à 1h00.
Après
l'émission, le sapeur Paisant, volontaire pour exécuter un coup de main
après l'opération, est tué par éclat d'obus.
Plus
de détails sur l'opération dans l'historique de la Cie 32/3
Le
2 septembre, la Cie débarque à Sarry (Champagne). Le 15 octobre, elle
quitte la Champagne pour Saint Menehould. Le 16, elle s'installe à La
Harazée.
Opération
du 8 novembre 1916, secteur de la Harazée, sous secteur de La Mitte (à
l'ouest de Kawalsky) (41e DI, 152e Brigade) :
Les
reconnaissances débutent le 18 octobre. A partir du 22, la Cie travaille
pour le génie Divisionnaire ; construction d'un lavoir et d'abris à
explosifs. Le matériel spécial est réceptionné le 27 et porté aux
abris d'attente dans la nuit. Les travaux pour le génie divisionnaire se
poursuivent, entre-coupé par divers cours de théorie sur le maniement du
matériel léger, en prévision de l'attaque.
Le
8 novembre, le vent étant favorable, la Cie est alertée à 18h30.
L'émission à lieu de 22h00 à 22h06. En raison de la rupture d'un tuyau
en caoutchouc et d'un grain local, deux sapeurs sont gravement intoxiqués
et 3 moyennement (28 intoxications au total selon le JMO de la 152e
Brigade, dont plusieurs cas mortels ; une vingtaine de cas paraissant peu
grave d'après le JMO de la 41e DI). On déplore également 5 intoxiqués
au 363e RI. L'artillerie canonne en même temps les positions
ennemies. La réaction de l'ennemie est immédiate, ses mitrailleuses et
son artillerie interviennent sur les premières lignes et les arrières.
Les postes avancées qui avaient été évacués, sont réoccupés à
23h15 après assainissement par la Cie.
Plusieurs
prisonniers seront faits et déclareront que l'opération fut une surprise
totale ; elle fit, selon leur témoignage, plus d'une quarantaine
d'intoxiqués dont plusieurs morts.
Pour
cette attaque, nous disposons de nombreux renseignements recueillis par un
poste d'écoute, qui a pu intercepter de nombreuses conversations téléphoniques.
"Dis-donc
! J'ai une nouvelle cartouche, heureusement ! J'en suis bien content
(...). Il y a une espèce de cloche, mais elle n'a sonné que longtemps
après. Il m'a fallu courir de tous côté ; j'ai fini par les trouver.
Ils étaient assis tous sur les escaliers et ne savaient plus que faire.
J'espère que cela ne se reproduira plus".
"Meister
est très indisposé.
-Il
n'avait donc pas de masques ?
-Si,
il a son masque. mais l'alerte a été donnée trop tard et il a pris une
bonne prise. Il y en a quelques-uns ici qui ont claqué".
"Eh
bien Willy ! Te voila encore en vie !
-Mais
oui. j'ai pu traverser le nuage de gaz ; mais il était temps. le nuage
était assez épais et nos appareils de secours n'ont pas fonctionné à
Richard. Un instant de plus et nous étions tous morts.
-Avez-vous
mis les masques ?
-Mais
naturellement, sinon je ne serai pas à l'appareil maintenant. J'ai aussi
perdu un téléphoniste ; il y a beaucoup de malades à la 4e Cie, il
manque 40 hommes. A l'observatoire, quelques-uns ont dû se rendre.
"La
nappe de gaz resta un quart d'heure dans les tranchées. On put ensuite se
risquer à sortir. L'odeur était très désagréable et insupportable. On
observa chez les hommes des quintes de toux, des vomissements, des
crachements de sang. Nous avons beaucoup de malades mon capitaine."
Le
15 novembre, la Cie quitte La Harazée à 23h et arrive à Beausejour à
6h.
Le
22 novembre débute la reconnaissance du secteur. Le
parc chimique est installé à La Chapelle. La construction des
abris débute le 26 novembre (0,80 m de recouvrement avec niche ; 120
postes), ainsi que la consolidation de la voie de 0,60 au fer de lance. Le
travaille prend régulièrement du retard ; les tranchées sont
régulièrement bombardées et dans un très mauvais état, les postes
s'éboulent régulièrement ou sont touchés par les bombardements.
Le
1er janvier, le capitaine Dautel quitte la Cie, remplacé par le capitaine
Zuezkiessiez. Les travaux se poursuivent, entravés par la neige.
Néanmoins, les abris sont terminés le 10 janvier et le transport du
matériel chimique débute. 360 en ligne le 11 janvier, avec des difficultés
énormes ; il s'achève le 20 janvier.
2088
bouteilles type lourd (83,5 tonnes), 738 demi-lourd (20 tonnes) et 280
légères (5,5 tonnes), soit 109 tonnes de gaz en ligne (environ 45 tonnes
par km).
Le
11 février, l'ennemi bombarde sérieusement le secteur. Plusieurs postes
sont effondrés, des parties entières, de tranchées nivelées. Le
secteur devient de plus en plus agité. Le 15 février, une reconnaissance
dans les tranchées allemandes est planifiée, avec le 110e RI et 8e RI ;
un caporal et trois sapeurs sont volontaires pour accompagner les
fantassins. A 1h du matin, l'ennemie bombarde le secteur à l'aide d'obus
lacrymogènes et toxiques. A 6h, l'ordre d'alerte est donné et les
sapeurs se mettent en tenue de campagne ; les pièces comptables et secrètes
sont transportées à l'arrière par le sergent major. A 9h10, la Cie est
mise sous les ordres du 208e RI ; la Cie se déplace à la sortir nord du
tunnel et est répartie sur différents points de résistance dans
l'après-midi. La situation s'aggrave encor et les tirs de barrage
augmentent encore d'intensité. Le 16 février, les renforts viennent
relever la Cie qui reçoit l'ordre de se replier sur ses cantonnements.
Mais le tir de barrage est tel que la Cie se replie à l'abri dans le
tunnel ; vers 7h, le tir diminuant, la Cie se replie par petits paquets.
Les
hommes qui assuraient la garde en ligne du matériel spécial ne
rejoindront pas le cantonnement ; aucun renseignement ne pu être
recueillit sur leur compte. Ces 47 hommes et officiers sont présumés
prisonniers. Les 3100 bouteilles en ligne, les nourrices et un grand
nombre de matériel sont tombés aux mains de l'ennemi. Le 21 février, la
Cie est réorganisée avec le personnel restant. Finalement, une petite
partie du matériel sera récupéré par la suite de l'occupation du
secteur par des troupes françaises, au mois de mars (quelques bouteilles)
; les Allemands auront récupéré tout le reste.
Le
25 février, la Cie quitte le camp Allègre et fait mouvement sur Sivry.
Opération
de La Harazée, 12 avril 1917 :
Le
26 mars, le capitaine se rend à La Harazée pour reconnaître un nouveau
secteur et un nouveau cantonnement.
Une
partie de la Cie arrive à la Harazée le 20 mars et débute
immédiatement les abris d'attente. Les 600 bouteilles sont réceptionnées
le 24 mars, et entreposées dans de grands abris en sape près de la route
de La Harazée. Le 26 mars débute le transport dans les abris d'attente
proches des premières lignes, puis le montage de la tuyauterie le 29.
Dès lors, la Cie est prête à opérer.
Le
11 avril, après plusieurs jours d'hésitation, la Cie monte en ligne,
alertée à 22h00.
Le
12 avril, l'émission a lieu de 2h00 à 2h15. Trois sapeurs sont légèrement
intoxiqués.
Opération
de La Harazée, 19 juillet 1917 :
Le
29 avril, visite d'un nouveau secteur d'émission, toujours dans la
région de La Harazée, sur un front de 400m. 750 bouteilles de type
lourd, chargées de chlore-phosgène, sont réceptionnées le 30 avril et
placées dans les abris d'attente en première ligne. Les tubes
d'émission sont montés et la Cie prête à opérer au soir du 1er
mai.
L'émission
à lieu le 19 juillet à 1h00. 11 sapeurs sont légèrement
intoxiqués.
Le
23 juillet, la Cie fait mouvement de Saint Menehould à Daucourt et Elise.
Opération
de Saint Baussant et dus bois de Mort-Marre, Seicheprey le 14 septembre
1917 et Marvoisin le 14 octobre 1917,
Le 8
août, la Cie arrive à Mandres-aux-quatre-Tours et s'y installe. Les
sections se répartissent entre Mandres, Rambucourt, et
Xivray-et-Marvoisin.
Le 10
août, les chefs de section reconnaissent leur secteur respectif (11e DI,
26e RI). Les directives sont données par le général commandant la 11e
DI le 11 août. Le 16 août commence les travaux d'aménagement des
tranchées d'émission et des abris d'attente, puis le matériel est
transporté dans la nuit dans le secteur d'émission au nord de Seicheprey,
aux abris d'attente, soit 260 bouteilles demi-lourd de chlore-phosgène et
200 de type léger de chlore-opacite. Dans ce secteur, la Cie est prête
à opérer le 18 août.
Le 24
août, la Cie transporte aux abris d'attente le matériel destiné à
l'opération au nord est de Marvoisin, soit 503 bouteilles. Le 30 août,
les préparatifs dans ce secteur sont terminés.
Le 13
septembre, la Cie est alertée à 22h et opère à 2h30 le 14 septembre.
Le front d'émission s'étend devant le quartier F3, à cheval sur la
route de Seicheprey à Saint Baussant, dans la direction générale de
Maizerais. L'opération dure 40 minutes.
Le lendemain, sept
patrouilles commandées par des officiers sortent de nos lignes à la
tombée de la nuit, avec pour mission de pousser aussi près que possible
des lignes ennemies et de tendre des embuscades. Aucun renseignement
important n'est ramené. Un prisonnier est fait, mais il venait
d'intégrer le secteur et n'avait pas subi l'attaque par vague.
Le 18 septembre, à 19h25,
un coup de main est exécuté sur les tranchées allemandes au nord-est du
bois de Jury, par un détachement d'élite de la 11e DI. Le but de
l'opération et de ramener des prisonniers ayant subi l'attaque par vague,
et de faire subir à l'ennemi des pertes. Une préparation minutieuse fut
exécutée à l'avance, sur le terrain même et à l'arrière. De
nombreuses répétitions de l'opération sont exécutées les jours
précédents. Plusieurs brèches sont créées dans les réseaux, à
différents endroits, pour ne pas indiquer le lieu de l'opération aux
Allemands. A 19h28, quatre prisonniers sont ramenés dans nos lignes et à
19h35, le détachement d'élite au complet est revenu. Les prisonniers appartiennent
au 67e RI (34e DI). 22 cadavres ennemis sont laissés sur le terrain ;
trois abris et une mitrailleuse ont été détruits. Le groupe chargé
d'explorer les abris trouve un certains nombre de cadavres dans les abris,
encore éclairés à l'électricité. Deux de ces abris sautent après
leur passage.
Le 31
août et les jours suivant, plusieurs détachements composés de sapeurs
de la Cie sont envoyés sur le front de la 24e DI pour participer à de
nombreux coups de mains. Dans ce secteur, une reconnaissance effectuée le
3 septembre dans la tranchée de Brandebourg, permit de faire un
prisonnier du 60e RIR (221e DI), qui déclara qu'une émission de gaz
était en préparation dans le secteur (tranchée de Hesse) de sa Cie et
qu'une équipe de pionniers spécialistes était chargée de
l'installation et de l'entretien. Une opération est menée le lendemain
et permet de constater que l'ennemi occupe et protège la tranchée de
Hesse. Le 8 septembre, une action est lancée pour occuper momentanément
le secteur concerné, sur une largeur de 300m et une profondeur de 250m,
jusqu'à la tranchée de 2e ligne. L'action est menée par 2 Cie du 50e
RI, une section de 40 sapeurs, et 6 sapeurs Z. Les hommes occupent la
position pendant une heure ; ils fouillent tous les abris et toutes les
sapes, puis les font sauter. Aucune installation d'émission n'est
trouvée. Les Allemands se défendent énergiquement. 19 prisonniers du
24e IR Bavarois sont pris ; ils déclarent que l'installation a été
emportée vers l'arrière trois jours auparavant et que les pionniers du
35e et 36 Bataillon ont également été renvoyés à l'arrière. Ils sont
tous munis du nouveau masque en cuir. L'opération a coûtée 8 tués, 40
blessés dont 9 graves. La Cie perd deux tués et 12 blessés.
Un
nouveau coup de main est exécuté le 12 septembre, avec des détachements
du 108e RI et du 126e RI, et permet de faire des prisonniers du 44e IR.
Ils confirment les déclarations des premiers.
Le 13
octobre, la Cie est alertée et l'opération à lieu dans la nuit, à
0h00.
Opération
du bois de Remières, 27 novembre 1917 et 9 décembre 1917 :
Le 19
octobre, un nouveau secteur est défini et les reconnaissances commencent.
Le 22 octobre, la Cie se déplace à Manoncourt-Ansonville. Le restant se
déplace le 25 au bois de la Hazelle. Les travaux débutent le 30 octobre.
Le matériel spécial est transporté aux abris d'attente les 7 et 8
novembre. Cinq fronts différents sont préparés.
Le 27
novembre, la Cie est alertée à 23h40. Elle est aux abris d'attente à
0h15. 2 front différents sont définis pour l'opération. La 3e section
porte le matériel sur le front n°2, 100 bouteilles chlore-phosgène et
100 bouteilles chlore-phosgène-opacite (4 tonnes de gaz). En raison de la
proximité de l'ennemi sur le front n°4, le matériel (150 bouteilles
chlore-phosgène, 3 tonnes) n'y est porté que lorsque l'heure
d'opération est connue.
L'heure
de l'émission est fixé à 3h30. Sur le front n°2, l'opération débute
par une vague claire durant 2 minutes, rendue opaque par l'ouverture des
100 autres bouteilles de BOC après 2 minutes. Durée totale : 4 à 8
minutes. Sur le front n°4, une seule vague claire chlore-phosgène à
3h40, pendant 4 à 5 minutes. A 3h45, déclenchement de nos tirs
d'artillerie et de nos mitrailleuses. Le vent oscille entre 1,5 et 2,6
m/s.
Il reste
trois autres front, n°1,3 et 5 (opération Stella), pour lesquels les
conditions favorables sont attendues. Elles sont réunis le 9 décembre
1917.
L'opération
débute à 22h00, sous un vent de 2 m/s.
Front
n°1 et 3 : une vague unique claire très dense avec ouverture pour chaque
front de 100 BC, puis 100 BOC après deux minutes pour rendre la vague
opaque (8 tonnes) 22h10, fermeture de toutes les bouteilles.
Front
n°5 : une première vague claire de 5 minutes : 250 BC, suivie à 15
minutes d'intervalle par une vague opaque de 250 BOC (10 tonnes au
total).
Les
premières sirènes ne sont entendues qu'à partie de 22h12 ; l'effet de
surprise semble avoir joué au mieux.
Le 15
décembre, la Cie part en repos à Omelmont et Clairey.
Le 11
janvier, la Cie s'embarque à Vezelise, débarque à Baccarat et se rend
à Pexonne, St Val et St Maurice.